Clotilde Schnell, son ascension chilienne

A ses débuts dans le basket, Clotilde Schnell était sans doute à des milliers de kilomètres de penser qu’elle pratiquerait ce sport dans un autre pays, et encore moins sur un autre continent. Aujourd’hui, elle a parcouru cette distance et même traversé un océan, tout en continuant à fouler les parquets, au Chili.

Voilà deux ans que Clotilde a traversé l’océan Atlantique et l’Amérique du Sud pour s’installer au Chili et sa capitale, Santiago. Un changement de vie total pour cette haut-rhinoise qui a démarré sa carrière à l’âge de dix ans à l’USB Colmar. Pourtant, la situation actuelle dans les Andes est critique, la faute à cette crise sanitaire mondiale qui touche de plein fouet le pays : « Contrairement à l’Europe qui commence à sortir la tête de l’eau, nous sommes en plein dans le pic du virus, et le système ultracapitaliste du pays n’aide malheureusement pas la population… Beaucoup de gens se sont retrouvés sans emploi donc dans des situations très précaires (sans chômage), et d’autres doivent continuer à sortir travailler dans des conditions pas toujours hygiéniques pour faire vivre leur famille. Je ne me plains donc pas, par rapport à la majorité des chiliens, je suis plutôt privilégiée ! ».

Une situation compliquée et tellement inhabituelle même si Clotilde se montre patiente en attendant que les choses s’améliorent. Et le moment où elle pourra refouler les parquets avec son club de Lobas marquera très certainement le début de cette fameuse « vie d’après ». Avant d’en arriver à disputer des rencontres de la première division chilienne, Clotilde s’est formée en Alsace. A Colmar tout d’abord, entraînée par Sacha Lukic, puis l’AS Wihr sous la houlette de Yannis Lefrang avant de rejoindre la SIG, à 16 ans. Entre-temps, elle a participé à plusieurs sélections d’Alsace et Zone Est qui se sont achevées avec le Camp National : « Le camp, c’était en 2008. De 2009 à 2012, j’ai joué à la SIG avant de faire une pause pendant une année pour me consacrer à mes études de géologie. J’ai ensuite repris en Nationale 3 à Duttlenheim pendant un an mais pour poursuivre mes études, j’ai dû rejoindre Nancy. Je ne jouais alors plus en club. Je me suis contentée de participer au championnat étudiant des facs et écoles nancéiennes, avec l’équipe masculine de mon école d’ingénieur (nous n’avions pas d’équipe féminine) qui montrait de bien meilleures performances pendant la troisième mi-temps ! En 2017 je suis partie en échange universitaire au Chili, où j’ai repris le basket avec l’équipe de mon université. Actuellement, je fais partie de l’équipe Lobas, nous évoluons en championnat national féminin chilien, et je joue également avec une autre équipe (Olimpia) un championnat amical ».

En parallèle de sa vie de sportive de haut-niveau, Clotilde mène une vie professionnelle « intéressante et dynamique », comme elle la décrit : « Je travaille pour une entreprise d’ingénierie spécialisée en géotechnique des ouvrages souterrains, c’est à dire que nous concevons les plans de ces ouvrages (par exemple des tunnels), analysons les terrains pour adapter les constructions, et supervisons les travaux ».

Revenue au Chili en 2018 après y avoir étudié un semestre quelques mois plus tôt, ce choix résultait d’un projet de vie : « Je désirais revenir vivre avec mon copain et je savais également que les opportunités professionnelles ne manqueraient pas ». Le basket, lui, intervient ensuite, en troisième position en quelque sorte. Pourtant, il occupe une grande place dans l’intégration rapide de Clotilde dans son nouveau pays : « J’ai repris contact avec mon équipe universitaire pour revenir m’entraîner a quand je suis revenue en 2018, et j’ai commencé à jouer pour Lobas sur demande de mon ancien coach Julio Figueroa (qui s’avère être également le coach de Lobas). Le milieu du basket Chilien est petit, et j’ai rencontré via des amis les filles de l’équipe de Olimpia qui m’ont tout de suite intégrée à leur équipe. Toutes les personnes que j’ai pu rencontrer grâce au basket sont aujourd’hui de bons amis, je pense si je me suis si bien intégrée au Chili c’est en grande partie grâce au basket ».

A Lobas, son club de première division chilienne, elle n’a pas eu de mal non plus à se faire sa place, sa taille (1m87) l’aidant fortement : « Je connaissais déjà la plupart des filles avec qui je jouais en équipe universitaire, ça m’a beaucoup aidé. Globalement les chiliennes ne sont pas très grandes, les filles ont donc été ravies quand elles ont vu arriver une nana de 1m87 pour renforcer la raquette ».

Et quant au niveau du championnat, celui-ci a rapidement épaté Clotilde : « Ce n’est pas un petit niveau. Les organisateurs et les clubs prennent cela très au sérieux et sont très investis. Et c’est aussi le cas avec Olimpia, dans ce championnat amateur que je dispute. C’est vrai que je ne m’attendais pas à ce que la ligue nationale présente un aussi bon niveau. Le Chili manque vraiment d’infrastructures sportives et d’organismes nationaux qui accompagnent les joueurs à fort potentiel. Aucun joueur ne vit du basket au Chili… Encore moins les joueuses ! Je ne m’attendais donc pas à ce que le niveau soit exceptionnel et je me suis bien trompée ! Chaque équipe a ses joueuses nationales majeures, qui sont en plus complétées par des renforts étrangers comme des américaines, dans les clubs qui ont les moyens financiers pour les faire venir ».

Pour Lobas, la joueuse majeure de l’effectif s’appelle… Clotilde Schnell. Là aussi, les performances de l’intérieure alsacienne ont de quoi surprendre, elle la première : « En commençant la saison, je ne me prenais pas la tête, je n’avais pas beaucoup le temps de m’entraîner et je pensais surtout apporter ce que je pouvais sans me mettre la pression. Après les 2 premiers matchs j’ai vu qu’on pouvait jouer une bonne place dans le classement, et mon esprit de compétition a pris le dessus ! Je jouais tous les matchs à 150%, mon objectif était de limiter le plus possible les américaines dans la raquette (la plupart étaient des postes 4/5 plutôt impressionnantes, le défi n’était pas moindre), et ça a porté ses fruits ! Ça m’a fait un bien fou de retrouver le basket de compétition après plusieurs années sans jouer en club, ça m’avait énormément manqué ! Et le fait d’avoir terminé avec de bonnes stats était la cerise sur le gâteau ».

22 points et 19,6 rebonds de moyenne, des statistiques incroyables qui plaçait Clotilde dans le cinq majeur du championnat à la fin de la saison. De quoi marquer de son empreinte le championnat et attiser la curiosité de ses coéquipières et amis : « Les chiliens sont plutôt curieux vis-à-vis des Européens, ce sont des gens d’une grande gentillesse. On me pose souvent beaucoup de questions sur la vie en Europe, comment fonctionnent les différents pays ou encore sur le niveau de basket en France ». Et puis, vivre au sein d’une culture si différente nécessite également quelques adaptations et habitudes…pas toujours faciles à prendre : « Les tremblements de terre… Il y en a très fréquemment, quasi tous les mois. Mon premier séisme, j’étais dans ma coloc pendant mon semestre d’échange, dans mon lit le soir. Tout commence à trembler autour de moi, je panique et sors en trombe de la chambre pour tomber sur mes colocs morts de rire qui attendaient de voir ma réaction à mon premier « temblor ». Ils me disent en rigolant « ah mais ça ce n’est rien, c’est un petit 6.8 (sur l’échelle de Richter) ». Quand on sait qu’en Alsace un 2.2 fait la une des journaux ! Je ne me suis toujours pas habituée aux séismes d’ailleurs (rires) ».

Néanmoins, le mal du pays se fait un peu sentir pour Clotilde : « Rentrer en France ? Je commence à y penser, mais seulement pour mieux repartir ! J’aimerais bien rentrer une année, être près de ma famille, que mon copain apprenne le français. Mais on a la bougeotte, on prévoit de partir au Canada, en Europe du Nord ou que sais-je encore ». Pour ainsi découvrir de nouvelles cultures et modes de vie … et de basket.

Crédit photo : Copaellipse.cl

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