Louis Rucklin, « l’an prochain, il faut que je passe un palier offensivement »

Louis Rucklin

Louis Rucklin (21 ans, 1m86), ancien international français U16 et U17, a été un des leaders de sa génération à la SIG Strasbourg, Champion de France Cadets (Poule Basse) en 2014, Champion de France en Espoirs en 2015 et double vainqueur de la Coupe de France U17 en 2015 et 2016. Il a vécu sa première expérience professionnelle la saison dernière en Pro B, au Lille Métropole Basket Club (2,6 points, 1,4 passe décisive, 0,8 rebond, pour 2,6 d’évaluation en 14 minutes), après avoir connu une grave blessure.

Bonjour Louis. Tout d’abord, comment s’est passé ton confinement ?

J’étais confiné une semaine à Lille, ensuite, comme plusieurs de mes coéquipiers rentraient chez eux et que la saison était suspendue, j’ai tout de suite essayé de trouver un moyen pour rentrer chez mes parents, à Mœrnach, dans le Sundgau, près de Bâle. En train ce n’était pas possible, en avion c’était aussi très compliqué, heureusement une agence de voiture de location m’a dit que c’était possible donc je suis rentré en voiture en faisant plus de six heures de route. On ne savait pas vraiment quand la compétition allait reprendre, je me suis donc maintenu en forme pendant cette période. J’allais courir, je faisais du vélo et surtout le président du club de basketball de mon village a accepté de me donner les clefs du gymnase. Le préparateur physique de Lille nous avait fait un programme individuel. J’ai aussi ajouté un programme poids de corps que j’ai l’habitude de suivre depuis plusieurs d’années, Julien Lenne (préparateur physique du centre de formation de la SIG Strasbourg) me l’avait préparé à l’époque.

Comment décrirais-tu ton style de jeu et comment aimes-tu évoluer sur un terrain?

On va dire qu’aujourd’hui je suis un meneur défensif, j’ai des qualités athlétiques qui me permettent de stopper des joueurs. Il faut que je progresse en attaque, surtout en prenant plus de tirs, il faut que je me libère et que je tente plus de choses sur le terrain, surtout que offensivement, avec mon explosivité, je peux créer des différences. Je travaille justement beaucoup en musculation pour continuer d’améliorer ce point fort naturel. Mes modèles seraient Eric Bledsoe (meneur NBA des Bucks de Milwaukee), très bon défenseur et Russel Westbrook (meneur NBA des Rockets de Houston), joueur très athlétique, qui offensivement pénètre avec agressivité, c’est ce vers quoi je dois tendre. Je dois aussi améliorer mon shoot extérieur pour être une menace de loin pour les défenses adverses.

Peux-tu revenir un peu sur ton parcours ?

En minime première année, je jouais au FC Mulhouse sous les ordres de Jean-Louis Tschamber et Annick Riff. Comme j’avais une année d’avance scolaire, j’ai postulé après le pôle à plusieurs centres de formation. J’ai rejoint la SIG Strasbourg et l’équipe de Jean-Lou Vuillaume. Cette première année a été un peu chaotique. Physiquement, étant encore minime, je n’étais pas du tout prêt au niveau cadet. J’ai trouvé qu’il y avait une énorme différence entre minime et cadet. Je me suis du coup blessé plusieurs fois : dès le premier match, je me suis fait une fracture du nez, puis j’ai multiplié les blessures de fatigue. Résultat, j’ai passé l’essentiel de mon année avec le kinésithérapeute en salle de musculation. Lors de ma première année officiellement cadet, avec Abdel Loucif, petit à petit j’ai fait ma place. Je me cherchais un peu, mais ils ont essayé au centre de formation de me donner des exemples du club. J’ai beaucoup regardé jouer Louis Campbell et j’ai essayé de reproduire ce que je voyais à mon niveau.

Lors de ma deuxième année cadet, j’ai vraiment commencé à jouer en Espoirs (14 minutes de moyenne en 9 matchs). Cette année là, on est Champion de France Espoirs, coaché par Lauriane Dolt, avec Anthony Labanca, Luidgy Laporal, Marc Kwedi, Tanguy Nicolas, Frank Ntilikina et Cédric Bah, que j’ai d’ailleurs rencontré cette année en Pro B quand on a affronté Blois, cela m’a fait plaisir de le revoir. Dans l’effectif, il y avait quelques Espoirs aguerris mais on était aussi plusieurs Cadets : on était cinq ou six à être sur l’effectif Espoirs en rotation, comme les Espoirs ne pouvaient pas jouer tout le match. C’est ce qui nous a permis d’être Champion de France, on avait des aînés qui étaient vraiment cool avec nous et qui nous ont intégré à ce projet. Les Espoirs mettaient un vrai rythme que ce soit à l’entraînement ou en match, cela nous a permis de fortement progresser. Ensuite, on a gagné deux fois la Coupe de France U17 avec notre génération (il a eu un rôle majeur dans ces victoires, notamment lors du second sacre, où il a été MVP du match avec 31 points pour 44 d’évaluation) et j’ai continué de progresser chaque année.

Lors de ma dernière année à la SIG Strasbourg, j’ai été prêté au Mans, une équipe de Jeep Elite jouant l’Europe, pour que je puisse être constamment intégré à l’effectif professionnel et que je puisse passer un palier. Sauf que, finalement, je n’ai fait que 11 matchs cette année car ma saison s’est finie fin décembre. J’avais une douleur à l’épaule depuis mi novembre, j’ai continué à jouer jusqu’à ce que cela empire : lors d’un échauffement j’ai eu la sensation de ne plus pouvoir bouger mon bras ! J’ai fait plusieurs tests mais ils n’étaient pas d’accord sur le diagnostic. J’ai donc demandé, avec mon agent, un autre diagnostic à la SIG Strasbourg. Le docteur Nicolas Sarbacher m’a mis en contact avec un chirurgien spécialisé dans l’épaule à Strasbourg. J’ai fait une IRM et il m’a annoncé que cela demandait une opération et signifiait une fin de saison pour moi. J’étais sous le choc car sur tous les précédents diagnostics on ne m’avait jamais parlé d’opération ! Au début, j’étais au fond du gouffre, surtout que c’était ma première grave blessure. Je suis retourné au Mans faire mes affaires et j’ai fait ma rééducation à Strasbourg avec Louis Feuillas, le kinésithérapeute de la SIG Strasbourg, que je remercie énormément. La rééducation s’est très bien passé grâce à Louis, quelqu’un que j’apprécie et qui travaille vraiment très bien.

Quels étaient tes objectifs en début de saison ?

Cette année, je pouvais encore jouer en Espoirs, mais mon objectif était de jouer au niveau professionnel pour passer un palier. Je cherchais une opportunité en NM1 ou en Pro B, mais c’était compliqué car j’avais l’étiquette du jeune joueur, sortant du championnat Espoirs, qui venait en plus de connaître une année quasiment blanche… J’ai eu la chance que le club du Lille Métropole Basket Club soit intéressé. J’ai eu Jean-Marc Dupraz au téléphone qui m’a expliqué son projet. J’ai tout de suite accepté ! C’est un coach réputé, c’était gratifiant pour moi. Je me suis engagé pour un an avec l’objectif de voir plus loin, si l’année se passait bien. Sortant d’une année blanche, c’était compliqué pour eux de me signer deux ans, au cas où si mon épaule n’était pas complètement guérie. Je devais être deuxième meneur back up, derrière un américain (Mike Holton Jr.). Je pensais, au début, avoir que quelques minutes mais, en définitive, j’ai joué treize minutes de moyenne, sortant d’une année sabbatique, pour une première expérience professionnelle, en plus en Pro B, c’est pas mal !

Comment s’est passée ton adaptation au niveau professionnel ?

Offensivement j’ai fait quelques bons matchs, mais j’étais irrégulier. J’ai apporté ma pierre à l’édifice. On termine sixième, on devait accéder aux playoffs, c’était une saison réussie collectivement. J’avais un rôle de meneur défensif, sur chaque poste Jean-Marc Dupraz avait un joueur avec un profil plus offensif et un avec profil plus défensif. Dans les titulaires, c’était Luc Loubaki qui devait verrouiller les gros meneurs adverses. J’étais un peu sa relève sur les extérieurs. Quand on était tous les deux ensemble sur le terrain on faisait des pressions tout terrain, on arrivait à provoquer des huit secondes… Finalement, mon adaptation s’est bien passée grâce aux cadres, les deux capitaines Jean-Victor Traoré et Nicolas Taccoen. Il n’y avait pas de clan, on était vraiment tous ensemble. Comme cela se passait bien en dehors, cela se passait forcément bien sur le terrain. Lors des entraînements, il y avait beaucoup de trashtalk, si on pouvait mettre trente points sur la tête de son coéquipier on le faisait. Il y avait toujours beaucoup de compétition. Tout le long de l’année c’était très intense et cela m’a permis de progresser.

Quels sont les petits détails qui t’ont permis de rebondir après tes blessures et tes échecs à la SIG Strasbourg et au Mans ?

Malgré ces blessures, dans ma tête, je savais où je voulais aller. Même s’il fallait du temps, même avec des complications, car tout n’arrive pas en claquant des doigts. La blessure c’est souvent l’obstacle du sportif. J’avais en tête de revenir plus fort. C’était un mal pour un bien car mentalement j’ai énormément progressé. Comme je ne pouvais vraiment rien faire, j’avais l’épaule dans une attelle pendant six semaines, ensuite j’avais ma rééducation, je me suis demandé ce que je pouvais faire… je me suis donc concentré sur le mental. Je me suis plongé dans des livres, c’est ça qui m’a permis d’être prêt. J’ai notamment réussi à m’enlever de la pression que je ressentais les jours de match. Je conseille par exemple le livre Relentless: From Good to Great to Unstoppable de Tim S. Grover. Cela m’a permis de revenir sans avoir la peur de me blesser de nouveau et de passer un cap. Ma famille a eu aussi un grand rôle, ils me parlaient d’autre chose et cela m’a permis de ne pas me focaliser sur ma blessure.

Quels sont tes objectifs pour la saison prochaine et où aimerais-tu être dans 3 ans ?

Cette année, défensivement, j’ai fait le travail. L’an prochain, il faut que je passe un palier offensivement, sans pour autant prendre des shoots casse-cou, il faut que j’ai plus d’intentions de jeu, que je sois plus dans l’agressivité. La qualité d’un bon meneur de jeu c’est de faire jouer ses coéquipiers tout en étant agressif, car si tu fais seulement jouer tes coéquipiers le défenseur va anticiper, c’est en étant agressif que tu ouvres des brèches à tes coéquipiers. Du coup, la saison passée, les joueurs s’adaptaient, ils reculaient ou ils passaient sous les écrans. Je devrais normalement poursuivre à Lille. Par la suite, d’ici deux-trois ans, je veux jouer en Jeep Elite puis en Coupe d’Europe.

Crédit photo : Franklin Tellier / SIG Strasbourg

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